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Conférence - Avons-nous besoin d'un regard critique sur la « Nouvelle Vague » ?

Arts et culture

Événement passé

Le 30/11/2023 à 18:00

Avenue Winston Churchill, 19000 Tulle, France


Entrée libre

Conférence de Federico Rossin, programmateur indépendant et historien du cinéma : « Avons-nous besoin d'un regard critique sur la "Nouvelle Vague" ? »

En partenariat avec l'association La Maison Rohmer.

« Les premiers à avoir un regard critique sur la « Nouvelle Vague » étaient en réalité ses figures plus connues, comme Claude Chabrol, François Truffaut ou Éric Rohmer : ils ont toujours eu une forte méfiance par rapport à cette appellation venue des journalistes et pas d'eux mêmes. Jean-Luc Godard ne l'aimait pas non plus, car elle avait pour lui un sous-entendu de « groupe » qu'il refusait (avant sa conversion maoïste en 68). Ces jeunes réalisateurs connaissaient bien le langage de la société du spectacle car, avant de passer derrière la caméra, ils étaient pour la plupart des critiques de cinéma, féroces contre la génération précédente des cinéastes. Ils étaient des individualistes mais qui avaient compris que dans l'industrie du cinéma moderne il fallait fonctionner en auto promotion et en réseau pour être les plus efficaces. Mais au fond ils refusaient l’idée d’une position commune ou d’un mouvement idéologiquement homogène, ou même un quelconque esprit collectif. Ce qui les reliait véritablement était le choix d'un changement dans le mode de production : ils pratiquaient un cinéma à petit budget qu'ils présentaient, racontaient et défendaient comme formellement novateur car affiché comme d'auteur (refus d'un scénario très écrit, préférence pour une nouvelle génération de jeunes acteurs/actrices qui savaient improviser les dialogues, usage des caméras plus légères et maniables, recherche d'un montage fragmenté et poétique). Et pourtant... si on considère à part les films les plus modernistes de Godard, Hanoun, Rivette et Pollet, leurs œuvres ne sont pas en si grande rupture avec une esthétique traditionnelle : on découvre un cinéma qui fait en effet de la mise-en-scène un fétiche mais qui se convertit très vite à une manière assez classique. Et finalement on remarque une structure du récit avec des histoires plutôt linéaires, et un modèle productif qui se structure autour d'un nouveau Star System pas si different, dans son fonctionnement, du précédent. Si on analyse de près les histoires et les personnages, on trouve souvent des clichés sur la société française de l'époque - parfois franchement réactionnaires -, un manque d'engagement politique - suspect dans la période de la guerre d'Algérie (l'exception qui confirme la règle étant Alain Resnais et Chris Marker), et des stéréotypes machistes sur les femmes et le couple - presque en opposition au féminisme naissant des années 60 (sauf pour la seule femme du mouvement, Agnès Varda). Tout en gardant son importance capitale, aujourd'hui il ne s'agit pas de casser le mythe « Nouvelle Vague », mais de le déconstruire, de considérer sa force indéniable dans l'imaginaire mondial mais aussi ses failles politiques, de reconnaitre son rôle d'ouvre-piste artistique mais aussi ses dettes esthétiques avec le cinéma classique, de le libérer enfin des incrustations critiques qui l'ont si rapidement momifié et rendu un objet culturel intouchable. » - Federico Rossin

Pour plus d'informations : peupleetculture19@gmail.com / 05 55 26 32 25