Action Sociale

Turbulences, contrôle et régulation sociale : les logiques des acteurs sociaux dans les quartiers populaires

, par Peuple et Culture

Manuel Boucher, L’Harmattan avec le concours de Peuple et Culture, 2003.
608 pages. 32 euros frais de port compris.

Face aux "peurs de la jeunesse" et aux turbulences sociales au sein des quartiers défavorisés, dans un contexte de décentralisation, de politique de la ville et de lutte contre le sentiment d’insécurité, l’espace de la régulation sociale est en recomposition. Nous assistons à une multiplication des acteurs de la "socialisation du risque" (intervenants sociaux, élus, médiateurs, policiers, acteurs associatifs laïcs et confessionnels…) devant répondre efficacement à l’exclusion de masse, aux incivilités et à la violence urbaine.

L’hypothèse centrale de ce livre est que, face à la "nouvelle question sociale", nous n’assistons pas à la décomposition de l’intervention sociale et au désengagement de l’Etat dans les quartiers d’habitat social mais bien plutôt à la diversification des modes d’intervention et des logiques d’action d’une multitude d’acteurs favorisant la recomposition de la régulation sociale, voire un processus de contrôle social renouvelé. Ainsi, grâce à une étude de terrain poussée au cœur de deux sites de l’agglomération rouennaise (Canteleu et les Hauts-de-Rouen) désignés comme prioritaires par les pouvoirs publics, cet ouvrage identifie qui sont les intervenants sociaux agissant dans les quartiers populaires et compare finalement leurs logiques d’action dans toute leur complexité (solidarités, concurrences, conflits…).

Par ailleurs, ce livre révèle qu’au-delà des différences statutaires, des contextes historiques de leur apparition, les acteurs canoniques et émergents de la régulation sociale sont des promoteurs du contrôle social, mais que certains d’entre eux sont aussi des acteurs de l’émancipation individuelle et collective favorisant la construction du sujet. En définitive, contrairement aux idées reçues, ce travail ethnographique passionnant montre que l’espace de la régulation sociale n’est pas un monde froid peuplé d’agents dociles dont la mission est de civiliser les "barbares incontrôlés" mais qu’au contraire, il s’agit d’un espace turbulent, conflictuel et plein de vitalité entre une pluralité d’acteurs dont le principal intérêt est leur hétérogénéité.